top of page

Mémoire et concentration : nourrir le cerveau, nourrir la vie

  • Photo du rédacteur: François Lovo Pro
    François Lovo Pro
  • 16 nov.
  • 4 min de lecture

Jeune femme concentrée en train de façonner une pièce de poterie sur un tour, illustrant l’attention, la créativité et la pleine présence.

La mémoire n’est pas un disque dur que l’on remplit au fil des années, ni un simple réservoir de souvenirs que l’on consulte de temps en temps. C’est une matière vibrante, un tissu en perpétuelle évolution, qui se modèle à chaque émotion, à chaque apprentissage, à chaque respiration profonde que vous offrez à votre corps. Rien n’y est figé. Le cerveau n’est jamais « terminé » : il se reconfigure, il se répare, il se renforce. Et lorsque nous nourrissons cette plasticité, nous nourrissons la vie elle-même.


J’aime souvent dire à mes patients que le cerveau est un organe noble mais exigeant. Il demande beaucoup, mais il redonne encore plus lorsque les conditions sont réunies. À lui seul, il consomme près d’un quart de notre énergie quotidienne. Pas étonnant qu’une alimentation appauvrie, un sommeil trop court ou un stress prolongé puissent si vite brouiller la pensée, créer des trous de mémoire ou fatiguer l’esprit.


Pour fonctionner pleinement, le cerveau dépend d’un carburant très particulier : des micronutriments précis, qui lui permettent de produire l’énergie et les messagers chimiques nécessaires à la concentration, à l’attention et à la mémorisation. Les vitamines B1, B3 et B5 soutiennent son métabolisme énergétique. La vitamine D protège les cellules nerveuses. Le zinc et la vitamine C participent à la synthèse des neuromédiateurs. Sans eux, l’information circule moins bien. Le cerveau se met à « patiner », comme une boîte de vitesse qui manque d’huile.


Je le vois régulièrement en consultation. Il y a quelques mois, j’ai accompagné une patiente – appelons-la Marie – une femme de 47 ans, très investie dans son travail, mais qui vivait depuis des semaines avec la sensation d’avoir « la tête brumeuse ». Elle se disait dispersée, incapable de se concentrer plus de dix minutes, fatiguée dès le réveil. Elle avait l’impression de perdre son efficacité, de ne plus « tenir le cap ».


En retraçant ensemble son hygiène de vie, tout devenait évident : des petits-déjeuners trop sucrés, une carence ancienne en vitamine D jamais réévaluée, très peu de bonnes graisses dans l’alimentation, des nuits écourtées par le stress et cette idée tenace qu’elle devait « tenir bon ». Quand je lui ai expliqué que plus de deux tiers de la membrane de ses neurones étaient constitués d’acides gras, elle a souri : « Donc je pense avec mes lipides ? ». Oui, exactement. Et lorsque les oméga-3, en particulier le DHA, manquent à l’appel, c’est toute la fluidité mentale qui se rigidifie.


Nous avons réintroduit ensemble des poissons gras, quelques cuillères d’huiles nobles (colza, noix), des graines de chia, un apport régulier en vitamine D, et surtout un rééquilibrage global de l’assiette. Les résultats ne se sont pas fait attendre : en trois semaines, elle retrouvait une clarté précieuse, une stabilité émotionnelle, et cette sensation de « penser à nouveau avec aisance ». Non pas grâce à une pilule miracle, mais parce qu’elle nourrissait réellement son cerveau.


Le sommeil joue un rôle tout aussi fondamental. Chaque nuit, l’hippocampe – ce gardien discret de notre mémoire – trie, organise et consolide les souvenirs. C’est lui qui décide ce qui sera oublié, ce qui sera conservé, ce qui sera renforcé.


Lorsque les nuits sont courtes, fragmentées, stressées, ce travail essentiel se déroule mal. On retient moins, on sature plus vite, on confond les informations. Je le rappelle souvent : la mémoire se construit dans la journée, mais elle se consolide la nuit. Et puis, il y a la dimension émotionnelle. Le cerveau n’est pas une machine froide. Il est poreux, sensible, réactif à nos états intérieurs. Le stress chronique, par exemple, surcharge les circuits dopaminergiques, crée un brouillard attentionnel, fige la pensée dans des schémas répétitifs. À l’inverse, la respiration lente, la cohérence cardiaque ou certains rituels simples d’apaisement permettent d’envoyer au cerveau un signal de sécurité. Cette sécurité ouvre l’accès à la concentration, à la créativité, au discernement.


Je pense à un autre patient, Luc, un homme de 32 ans, très performant au travail mais épuisé intérieurement. Il décrivait son mental comme « un navigateur avec vingt onglets ouverts en permanence ». Une grande partie de ses difficultés n’était pas liée à un manque de micronutriments, mais à une hyperstimulation constante, une absence de respirations profondes, de pauses, de moments pour « débrancher ». Le simple fait d’intégrer trois fois cinq minutes de cohérence cardiaque par jour a transformé sa capacité de concentration. Non pas parce qu’il faisait un « exercice », mais parce qu’il redonnait à son système nerveux un terrain stable.


J’insiste souvent sur un point essentiel : le vieillissement cognitif n’est pas une fatalité. Les neurones continuent de créer de nouvelles connexions jusqu’au dernier jour, à condition qu’on les stimule. Apprendre une langue à 60 ans, découvrir un instrument à 70, reprendre un carnet de dessins à 50, s’émerveiller devant un paysage, marcher dans la nature, partager un repas, rire, s’émouvoir… tout cela nourrit le cerveau autant qu’une assiette équilibrée.


La mémoire émotionnelle – celle du cœur, des sensations, des rencontres, des éclats de rire, des gestes de tendresse – est souvent plus durable que la mémoire verbale. Et elle mérite autant d’attention.


Nourrir le cerveau, c’est donc nourrir un lien : celui qui unit le corps, l’esprit, les émotions et le monde qui nous entoure. C’est entretenir une curiosité vivante, une capacité d’émerveillement, cette étincelle intérieure qui nous permet de rester pleinement présents.


Lorsque le cerveau est soutenu, c’est toute la personne qui s’éclaire. La pensée devient plus limpide, la mémoire plus stable, l’attention plus généreuse. Et la vie, plus dense, plus consciente, plus joyeuse. mémoire et concentration



Commentaires


bottom of page